Dans le cadre de la 38e Assemblée des délégués des JDS, le 28 mai 2016 à Bâle, le débat brûlant de la discrimination fondée sur le sexe dans le contexte religieux a été abordé sous deux angles différents. D’abord, Andreas Stöckli, professeur-assistant de droit public à l’université de Bâle, a montré dans quelles hypothèses la liberté religieuse entre en conflit avec le mandat d’égalité défini par la constitution fédérale et comment le Tribunal fédéral (TF) et la Cour européenne des droits de l’homme se sont prononcés dans des cas d’espèce. Ainsi, le TF n’a désapprouvé que récemment une interdiction du port du voile dans une école publique en se référant à l’autodétermination de la femme (arrêt 2C_121/2015). En cas de voile intégral, la question de l’autonomie de la femme se compliquerait du dilemme qu’une interdiction puisse conduire à une relégation problématique des femmes dans l’espace privé. La mise en balance de la liberté religieuse et de la parité trouverait en tous les cas sa limite lorsque, sous le couvert de la liberté religieuse, il y aurait des atteintes à l’intégrité physique et psychique.
Ensuite, Andrea Maihofer, professeure et directrice du centre d’études des genres à l’université de Bâle, a expliqué la logique dialectique de la conception de l’égalité. La formule de l’égalité qui dit qu’il faut traiter de manière égale ce qui est égal en raison de l’égalité et de manière inégale ce qui est inégal en raison de l’inégalité contiendrait une structure dialectique dans laquelle la différence engendre une discrimination par une exclusion. En effet, le fait de prétendre que les différences entre les êtres humains seraient notables, par exemple en raison de leur genre, permettrait à la formule de servir de légitimation à la discrimination des femmes ou des personnes appartenant à une autre culture ou religion. Ainsi, le Message de 1957 relatif au suffrage féminin invoquait la dissemblance notable de la femme par rapport à l’homme pour affirmer qu’il n’était pas contraire au principe constitutionnel de l’égalité d’exclure la femme du droit de vote. Par cet exemple, Andrea Maihofer a clairement montré que l’égalité hommes-femmes actuellement reconnue par les tribunaux n’est pas forcément une évidence.
Selon la célèbre parabole des trois anneaux de Lessing, les êtres humains seraient certes différents pour être nés dans des religions différentes, mais il pourrait être fait abstraction de cette différence en raison de leur commune appartenance au genre humain. Cela signifie que la garantie des mêmes droits se base ici sur la reconnaissance en tant que personnes égales et pas, en plus, sur une reconnaissance dans leur différence.
Le fait que des différences soient considérées comme fondamentales ressortirait par exemple de la perception de l’Islam comme une menace pour la femme et par conséquent comme un motif légitime d’exclusion des mêmes droits, alors qu’en même temps, la conception usuelle de l’Eglise catholique, qui lui sert à justifier notamment son refus d’ouvrir des postes dirigeants aux femmes ou son insistance sur la famille traditionnelle, ne serait pas problématisée de la même manière dans la société. C’est pourquoi, selon Andrea Maihofer, la conception même de l’égalité a besoin de continuer à se développer pour garantir l’égalité dans les relations entre hommes et femmes. En fin de compte, il serait décisif de savoir quelle idée de l’égalité prévaudrait dans la société.
Cette thèse a, dans son résultat, été approuvée par Andreas Stöckli : celui-ci a relevé que les autorités veillent actuellement au respect du mandat de parité – dès lors que la société n’a précisément pas (encore) réalisé l’idéal de l’égalité auquel il est aspiré –, et demeurent attentives à ce que la promotion du genre féminin ne conduise en principe pas à une discrimination du genre masculin.

Michelle Lachenmeier, membre du Comité des JDS de Bâle
plaidoyer 4/2016