Chaque année, les guerres et les conflits armés tuent des dizaines de milliers de personnes, en blessent, traumatisent et poussent à la fuite des millions. En même temps, l’industrie internationale de l’armement réalise des bénéfices exorbitants en livrant sans vergogne des armes aux parties aux conflits. Les Juristes Démocrates de Suisse font partie de la coalition qui veut changer cela par l’Initiative contre le commerce de guerre, qui sera soumise au vote le 29 novembre 2020.

Pour pouvoir produire du matériel de guerre et fournir des armes aux parties aux conflits, l’industrie de l’armement doit être financée. Sur ce point, la Suisse joue un rôle central. Les entreprises d’armement ont besoin de fonds en main de tiers, qu’elles trouvent sur les marchés financiers sous la forme de capital-actions, d’emprunts ou de capitaux étrangers à court terme. La Suisse est une des plus grandes et plus importantes places financières du monde et administre un patrimoine de plus de 6943.5 milliards de francs. Environ la moitié de cette somme provient de l’étranger. Le solde correspond à des fonds appartenant à la population suisse. L’argent qui parvient à l’industrie de l’armement par le biais de nos banques, institutions de prévoyance et sociétés d’assurances nous rend complices des entreprises qui tirent profit des guerres – souvent sans que nous le sachions. La Banque nationale suisse (BNS) a par exemple investi 1.3 milliard de dollars US en 2018 dans des sociétés qui produisent des armes atomiques.
L’Initiative contre le commerce de guerre s’inscrit dans ce contexte. Elle demande que le financement de l’industrie internationale de l’armement par des acteurs financiers suisses soit interdit. Sont notamment visées la Banque nationale, les fondations de droit suisse, les institutions étatiques ou privées de prévoyance (AVS, AI, PC, APG, Fonds de compensation AVS, et caisses de pension de droit public et privées) ainsi que les banques et les assurances. A l’avenir, toutes ces entités ne sauraient faire parvenir, ni directement ni indirectement, leur argent à l’industrie de l’armement.
Il a été longtemps prétendu que le fait d’exclure les producteurs d’armement des portefeuilles des placements diminuerait les rendements et augmenterait les frais pour les investisseuses et les investisseurs. Il a aussi été dit que la sécurité des rentes dans les institutions de prévoyance serait menacée. Les développements vertigineux dans le domaine du pilotage des flux financiers dans les activités durables (sustainable finance) prouvent justement le contraire : il existe un consensus largement soutenu dans les milieux scientifiques et politiques non seulement sur la nécessité d’investir dans le durable, mais aussi sur la rentabilité d’un tel investissement. Si, par exemple, les caisses de pension suisses n’avaient investi il y a un an que dans le durable, leur fortune serait aujourd’hui de 9 milliards de francs en sus. La plupart des stratégies de durabilité sont encore avant tout motivées par des critères écologiques sur la place financière suisse. En tant que dépositaire-étoile notamment des conventions de Genève et en tant que siège du Comité des droits de l’homme, la Suisse est tenue de ne pas s’enrichir sur la misère générée par la guerre et les conflits ou de la cofinancer. Les obligations découlant des droits humains s’appliquent aussi aux responsables de finances. L’Initiative contre le commerce de guerre correspond à une évidence. Veillons à ce qu’elle soit inscrite à l’avenir dans notre constitution. Votons OUI à cette initiative le 29 novembre 2020.
Plus d’infos : www.commercedeguerre.ch


Par Michael Christen, Comité JDS/DJB

plaidoyer 5/2020

 

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